lundi 23 janvier 2012

Chapitre 13






Cette nuit encore, je n'ai pu me résoudre à m'endormir. Ian est resté avec moi durant la première moitié de la nuit. Nous avons eu un appel de Gabriel nous prévenant que si je changeais d'avis, il n'était pas loin. Mais ce ne fut pas le cas et nous nous sommes blottis dans les bras l'un de l'autre et avons discuté de notre enfance, de nos souvenirs les plus heureux.
Les plus beaux moments de Ian, se déroulaient tous, soit avant la disparition de sa maman et de sa petite sœur, soit après notre rencontre. Et pour ma part, il en était de même. Mon enfance auprès de ma mère avait été heureuse et j'étais certaine que même si Gabriel avait été là, nous n'aurions pas été plus heureuses. Cela aurait été une autre sorte de bonheur tout simplement. Et puis s'il avait été là, peut-être que ma mère...Non, je me refuse de lui en vouloir pour l'assassinat de ma mère. Pour son absence oui mais pas pour elle. Il aurait beaucoup de choses, à m'expliquer le jour où je lui dirai.



Cloé et Adam ont pris le relai de Ian vers trois heures du matin, pour qu'il aille dormir un peu. Nous avons lancé un jeu basé sur le mensonge et la vérité. Chacun de nous devait dire trois phrases, l'une disant la vérité et les deux autres étant des mensonges.



- Tu commences Cloé ! Lui lance Adam.
- Ok! Alors...J'ai menti au sujet de ma note lors du dernier contrôle. Je ne porte pas de sous-vêtements la nuit. Et...j'adore les glaces à la pistache.
- Je connais la réponse lui répond Adam.
- Alors à toi de deviner Erin. Quelle est la vérité ?
- OK. Je pense que c'est... je ne porte pas de sous-vêtements la nuit.
- Faux ! S'exclame-t-elle. J'ai menti sur ma note.



J'en reste sans voix. Puis elle m'explique.



- J'en ai eu assez, tout le monde disait que j'allais encore avoir un A, du coup j'ai dit que j'avais eu...
- Un C la coupais-je. Oui, je m'en souviens, j'en avais pas cru mes oreilles.
- À toi Erin maintenant.
- Ok. J'ai failli mourir dans un incendie. Je piquais des bonbons à l'épicerie quand j'avais huit ans. J'adore les pâtes à mâcher à la fraise. Adam, quel est la vérité ?
- Euh, je dirais...que tu piquais des bonbons.



J'éclate de rire avant de lui répondre.



- Non, dis-je tout en riant encore. J'ai failli perdre la vie dans un incendie.
- Oh mon Dieu s'écrit Cloé. Quand est-ce arrivé ?
- J'étais petite, je devais avoir six ans par là. Comme maman dansait dans un ballet et qu'elle avait des répétitions tard, je restais chez une vieille voisine. Un soir, alors que je regardais la télévision, une bûche est tombée de la cheminée qui n'avait pas de protection et elle a roulé sur le tapis qui a pris feu. Elle n'avait pas d'extincteur alors elle a fait de son mieux pour tenter d'éteindre avec un torchon mouillé mais ça n'a pas suffi. Heureusement, un voisin a été alerté par nos cris et il a tout éteint.
- Incroyable. Elle était inconsciente de mettre un tapis là.
- Oui. À toi Adam.
- Ok les filles. Alors moi, je porte toujours mon boxer favori quand je compte faire l'amour avec une femme. Je me lave les dents quatre fois pas jour. Et la dernière, j'ai failli m'appeler Honorine.



Cloé et moi partons dans un fou rire en entendant sa dernière proposition.



- Alors Cloé ? Erin ?
- Moi je dirais la première dis-je les joues rosies à cette idée.
- Et moi. Dit Cloé, je suis sûre que c'est la deuxième. Je ne t'ai jamais vu mettre le même boxer quand nous avons fait l'amour ensemble.
- Et bien vous avez toutes les deux tort. Mes parents voulaient m'appeler Honorine si j'étais une fille. Heureusement, il s'est avéré que j'étais un mec !



J'ai tellement envie de rire, que je prétexte un besoin pressent pour m'éclipser dans la salle de bain.
Je dois me lever trop vite, car la tête me tourne un peu. Je me retiens à mon bureau, ferme les yeux un instant puis reprends mon chemin.



- Tu vas bien ? S'inquiète Adam.
- Oui, je me suis levée trop vite. Ça va.



Mais il n'en est rien, je me sens légèrement barbouillée et la pièce continue à tourner doucement.
Je me passe un peu d'eau sur le visage et reste assise sur les toilettes.



- Erin ! Tu te sens bien ? Me demande Cloé de l'autre côté de la pièce.



- Oui, je me rafraichis, j'arrive.



Je me force à me relever et retourne avec mes amis en m'efforçant de sourire pour ne pas les inquiéter. Mais alors que je suis au milieu de la pièce, tout autour de moi tourne de plus en plus vite jusqu'à ce que je me sente tomber.
J'entends Adam et Cloé m'appeler mais je ne parviens pas à les voir et peu à peu, malgré une lutte acharnée avec moi-même, je finis par perdre conscience.



- Tu en as mis du temps ! J'ai bien cru que tu n'allais jamais te réveiller !



J'ouvre doucement les yeux, une lumière extrêmement forte m'aveugle pendant un moment, puis un visage commence à se dessiner au-dessus du mien.



- Sabrina !
Je compris immédiatement où je me trouvais. Je me souvenais avoir perdu connaissance.



- Je suis morte ?
- Mais non idiote ! Du moins pas encore.
- Tu vas me tuer ?
- Oh la la ! t'es-tu cognée en tombant ?
- Je ne pense pas.
- Tu sais bien que je ne peux pas te tuer! Mais c'est pas l'envie qui me manque. Ça fait des jours que j'attends que tu viennes me donner ta réponse et organiser ton retour près de ta mère.



Un instant je pense à faire semblant de reperdre conscience mais est-ce que cela marchera ? Et comment retourner à l'institut?



- Bon alors? Que veux-tu faire ?
- Tu comptes vraiment faire ce que je veux ?
- Je te le demande, j'ai pas dit que j'allais le faire !
- Je veux me réveiller et rentrer chez moi.
- Tu ne veux donc pas retrouver ta mère ?
- Je ne la retrouverai jamais! Dis-je à la limite de la colère.



Elle continue de me faire croire que je pourrai retrouver ma mère et rester avec elle.



- Et bien, si tu ne veux pas rester avec ta mère, je te propose de le lui annoncer toi même.
- Je vais pouvoir la voir ?
- Tu vas lui dire de ta propre bouche que tu refuses de rester avec elle. Suis-moi.



Sabrina m'entraîna dans le couloir si familier à présent. Nous passons devant plusieurs portes, puis elle finit par s'arrêter devant une double porte.



- Si j'entre, je n'en ressortirai plus c'est ça ?
- Ne sois pas idiote! Évidement que tu pourras en ressortir. Tu pourras même te réveiller à ton retour !
- Et tu me laisseras tranquille ?
- C'est pas très gentil ! Je nous pensais amies maintenant.



Elle avait achevé cette dernière phrase avec un sourire diabolique qui me fit froid dans le dos.



- Nous ne sommes pas amies ! Tu me hantes chaque nuit, m'empêchant de vivre comme je le voudrais, m'empêchant de...enfin bref, tout ça parce que je t'ai heurtée sans le faire exprès.
- Tu parles de moi comme si j'étais un fantôme rigole-t-elle. Je ne te hante pas ! Je prends juste un malin plaisir à te retrouver chaque nuit et t'en apprendre plus sur toi. Est-ce méchant de ma part ? Grâce à moi, je te rappelle que tu connais la vérité sur ton père, que tu vas revoir ta mère. Je t'ai même proposé de rester à jamais à ses côtés alors pourquoi me détestes-tu autant?
- Ce que je te reproche, c'est...



Je ne savais pas au fond, ce que je lui reprochais. Dans le fond, elle n'avait pas tort.
Bats-toi mon amour, résiste lui et reviens moi
Ai-je rêvé ou ai-je vraiment entendu Ian me parler.



- Tu as entendu ?
- Entendu quoi ? me demande-t-elle.
- Rien, j'ai dû rêver.



Ian doit être près de moi. Cloé et Adam ont dû l'appeler, lui parler de mon malaise. Le pauvre doit être mort d'inquiétude. Soudain, un sentiment de culpabilité s'empare de moi. Je lui cause tellement de soucis. Peut-être devrais-je rester ici, il serait sûrement malheureux au début, mais il finirait par m'oublier. Et moi, est-ce que je serais en mesure de l'oublier ?
Non, jamais il ne sortira de mes pensées, alors pourquoi en serait-il différent pour lui ?



- Bon tu te décides oui ou non !



Alors que les paroles que je pense venir de Ian me rappellent de me battre et de lui revenir, je pose la main sur la poignée et la tourne doucement.
J'appréhende de voir ce qui se trouve derrière. Je pousse la porte et fais un premier pas. Je regarde autour de moi, et reconnais immédiatement la pièce où je me trouve. Ma chambre. Pas celle de l'institut que j'occupe depuis presque un an, non, mais celle que j'ai toujours connue, celle de l'appartement que je partageais avec maman. Mes murs rose et prune, ma commode avec ma collection de fées, ma petite table de nuit avec une photo de moi et maman. Mon lit, avec ma couette faite maison. Ma mère avait ajouté du tissu pour agrandir ma couverture de bébé. Je regardais la porte, celle qui avant donnait dans le couloir face à la chambre de ma mère. Allait-elle m'y conduire ? Je l'ouvre. Et me retrouve comme prévu dans le couloir, ce qui mène au salon. Je suis surprise par la délicieuse odeur d'épices qui règne. Je m'avance dans la cuisine, et la découvre. Ma mère est là, elle est dos à moi et se tient devant le plan de travail de la cuisine. Elle se retourne pour prendre du sucre en poudre dont le paquet est posé derrière elle. Ma mère s'arrête net et me regarde.



- Tu es déjà rentrée ?



Je regarde tout autour de moi, mais il n'y a personne.



- C'est à moi que tu parles ?
- Tu vois quelqu'un d'autre ici, Savannah ?
- Tu me vois vraiment ?
- Qu'est-ce qui t'arrive ?
- Rien lui dis-je en me jetant dans ses bras.



Me mère me serra contre elle et blottissant ma tête dans ses cheveux, je respire à pleins poumons et profite de cette petite part de bonheur.



- Et bien, quel amour après deux heures de séparation !



Dois-je lui dire? Dois-je lui révéler qu'elle m'a quittée, que ça fait deux ans que je survie sans elle à mes côtés ?Non, je ne veux pas, je ne peux pas la perdre une fois encore.



- Que fais-tu ? Lui dis-je doucement en m'écartant un peu d'elle sans pour autant rompre le contact.
- Je te fais du pain d'épice.
- Miam !
- Il va falloir attendre un peu avant de le déguster. Il doit cuire avant tout.



La sonnette de la porte se fait entendre.



- Tu veux bien aller ouvrir chérie?
- Oui.



J'ouvre la porte, et découvre Sabrina de l'autre côté.



- Tu lui as dis ?
- Non.
- Qu'attends-tu ? Je croyais que tu étais pressée de retrouver ta vie.
- Je...est-ce que je peux rester ?
- Évidement ! Tu as encore le choix.
- je veux dire, est-ce que je peux rester encore un peu ?
- C'est définitivement ou rien !
- Laisse-moi encore un peu de temps.
- Tu dois faire ton choix et lui annoncer. Maintenant ! Je te laisse cinq minutes pour lui dire.



Je retourne à la cuisine, les yeux pleins de larmes. Jamais je n'ai eu un choix aussi difficile que celui-ci. J'ai dit à Ian qu'il n'y avait pas de choix mais c'est faux. Je viens de parler et de serrer ma mère dans mes bras, elle est bel et bien réelle, je pourrais rester avec elle. Je dois choisir entre mon âme sœur et ma mère. Y a-t-il quelque chose de plus dur à faire ?
Les mots « bats-toi » et « reviens moi » hantent toujours mon esprit.
Ma mère ayant toujours été de bon conseil, je décidais de lui parler de tout. Va-t-elle me croire ?



- Maman. Dis-je en revenant dans la cuisine.
- Qui c'était ?
- Une erreur. Maman, il faut que je te parle de quelque chose, c'est important.
- Ça a l'air grave. Tu n'as pas d'ennuis au moins ?
- Non. Allons-nous asseoir. Tu veux bien ?



Elle me suit et nous allons nous mettre dans le salon.



- Maman, j'ai besoin de tes conseils. Tu vas peut-être avoir du mal à me croire mais il faut absolument que tu ne te concentres que sur ce que je vais dire et pas ce que tu penses pouvoir exister d'accord ?
- Je ne comprends rien !
- Je dois faire un choix.
- D'accord.
- Je dois choisir entre rester dans le monde réel avec celui que j'aime ou ...
- Tu as un petit copain ! C'est ça que tu essaies de me dire. Parle-moi de lui. Est-il gentil ? Est-ce que tu l'aimes vraiment ?
- Oui maman, il est merveilleux et tu l'aimerais beaucoup toi aussi si tu le voyais.
- Quand vais-je le rencontrer ?
- ...Jamais maman, c'est impossible.
- Pourquoi ?
- Maman écoute-moi s'il te plaît. Je n'ai pas beaucoup de temps.



Elle acquiesce de la tête et m'écoute attentivement lui raconter tout ce qui s'est passé. Je vois bien à son visage, qu'elle me croit folle mais elle respecte sa promesse et me laisse aller jusqu'au bout.



- C'est une drôle d'histoire que tu me racontes là. Tu as vraiment une bonne imagination, tu devrais écrire un roman ma chérie.



Elle ne me croit pas. Je décide alors de changer de technique pour obtenir les réponses dont j'ai besoin.



- Je verrai, pourquoi pas, mais il faut que tu m'aides à trouver la chute de cette histoire. Que devrait faire mon héroïne ? Doit-elle choisir la vie et l'amour de son petit ami ou doit-elle faire le choix de vivre dans une sorte de monde parallèle avec sa mère ? Sachant que si elle choisit sa mère, elle n'aura pas d'avenir, juste une routine l'une avec l'autre.
- Si j'étais cette maman, je conseillerais à ma fille de vivre sa vie, de grandir, de se construire un avenir, de se marier, d'avoir des enfants. De choisir la vie, que de toute façon elle me retrouverait quand son heure serait venue et qu'elle aura profité. On ne devient pas maman pour soi, on le devient pour donner la vie et aider un enfant à devenir un adulte responsable et bien dans sa peau. C'est ce que je fais avec toi, et si j'ai encore un peu de boulot, je trouve mon travail plutôt réussi.



La sonnette retentit à nouveau. Je sais que c'est Sabrina qui veux sa réponse et je sais exactement ce que je vais lui dire.



- Maman, je dois sortir. Je n'en ai pas pour longtemps!
- Sois rentrée pour le dîner.
- Promis !



Je me dirige vers la porte et ouvre à Sabrina.



- Alors ?
- Je veux rester !
- Je suis contente que tu aies fait le bon choix!
- Comment je dois faire ?
- Tu vas te réveiller et me rejoindre Place des Tertres, c'est près du Sacré Cœur.
- Quand ? Où exactement ?
- Après-demain, j'ai un appartement Rue du Calvaire, c'est juste à côté de la place.
- Ok, donc samedi, chez toi, Rue du Calvaire.
- Tu ne te demandes pas comment ça va se passer ?
- Je sais ce qui va se passer, tu vas me mettre en contact avec un incube qui va me tuer et je suppose qu'après je me retrouverai avec ma mère.
- C'est exactement ça.
- J'ai une question ?
- Laquelle ?
- Est-ce que les succubes vivent en groupe comme nous ?
- Certains oui mais la plupart vivent seuls !
- Tu dois être seule toi...
- pourquoi dis-tu ça ?
- Tu sembles être seule.
- Tu te trompes, je vis avec deux amis.
- Des incubes ?
- Oui, tu pourras choisir celui de ton choix si tu veux !
- Peu importe ! Ce qui compte, c'est que je retrouve ma mère au plus vite.
- Très bien. Dans ce cas, je te dis à Samedi ma belle et tache de venir seule!
- Crois-tu vraiment que je pourrais venir accompagnée ? Si je leur dis, aucun de mes amis ne me laissera faire. Mieux vaut que je me taise.
- Très bon choix !

2 commentaires:

Céline a dit…

J'espère juste que Erin n'a pas fait le mauvais choix ... qu'elle va utiliser Sabrina pour la supprimer et pas pour quitter Ian !
Je suis pressée de connaître la suite.

Lau. a dit…

J'ai hurlé de rire au jeux des vérité xD
Les retrouvailles avec la maman d'Erin sont chou, malgré les circonstance, et sa mère lui donne vraiment de bon conseil. J'espère simplement qu'Erin va le suivre et ne pas se rendre a ce rendez vous fatal...